Monsieur Bacquelaine, Monsieur le Ministre,

Le 10 octobre – hasard du calendrier le jour de notre grève dans les services publics – vous faisiez paraître une carte blanche osant une comparaison entre les différentes organisations syndicales.

À la lecture de celle-ci, nous pourrions, simplement, vous conseiller de ne pas trop vous hasarder sur les chemins de l’analyse politique. Mais ce serait un peu court, et le souci démocratique qui semble, par moments, vous animer mérite mieux que ce conseil.

Nous comprenons fort bien qu’un homme de votre famille politique fasse le choix de s’attaquer aux services publics, au statut du fonctionnaire, à la protection sociale, au droit du travail et aux organisations syndicales. Vous avez choisi votre camp, comme nous avons choisi le nôtre !

En revanche, l’utilisation d’amalgames douteux, de généralisations hâtives et de contre-vérités ne sont pas en votre honneur.

Car vous savez que la CGSP a tenté de négocier là où le Gouvernement, dont vous faites partie, ne voulait que consulter les organisations syndicales. Vous savez qu’après avoir laissé traîner en longueur le dossier de la pénibilité, vous voulez maintenant en finir dans les plus brefs délais.

Tout cela, vous le savez fort bien !

Mais revenons au point central de votre argumentation : la Démocratie !

Monsieur le Ministre, c’est se donner bonne conscience à moindre frais que de confondre, comme vous le faites, démocratie libérale et libéralisme, et il est regrettable de voir un homme tel que vous commettre une telle erreur.

Car le libre marché n’aime pas la démocratie, bien au contraire. La lecture des « grands » accords commerciaux mondiaux qui donnent la capacité aux multinationales d’attaquer les États qui, démocratiquement, ont fait le choix de prendre des mesures pour protéger l’environnement, la santé publique ou les travailleurs, le prouve à suffisance.

La Démocratie, c’est l’émergence et le respect de la contradiction, de la contestation.

La Démocratie, c’est la constatation de l’opposition de points de vue et la tentative, fragile, de travailler au dépassement de celle-ci. Bref, la Démocratie, la vraie, se juge à sa capacité de considérer l’opposition, fut-elle menée lors d’une manifestation ou d’une grève, non pas comme un péril mais comme une source de progrès.

Alors oui, nos actions peuvent être une menace pour vos choix politiques, peut-être même pour votre place de ministre. Mais jamais elles ne mettront en péril la Démocratie car elles sont, par la voix des dizaines de milliers de femmes et d’hommes qui les portent, une expression vivace de cette démocratie.

Une expression qui au fil des décennies a permis, grâce au courage et à la volonté, de nombreuses et significatives conquêtes sociales aujourd’hui menacées par votre gouvernement.

Votre crainte, c’est que certains fassent la preuve qu’il existe dans ce pays une opposition à vos politiques. Voilà pourquoi vous tentez de discréditer nos actions.

Pour finir, nous aurions aimé que votre exigence démocratique trouve à s’exprimer face aux méthodes et aux agissements du Secrétaire d’ État à l’asile et aux migrations. Votre silence en la matière en dit plus long sur votre conception de la Démocratie que vos dissertations sur le sujet !

Démocratiquement,

 

Laurent Pirnay                                                                                                                   Patrick Lebrun

Secrétaire général adjoint de l’IRW-CGSP                                                                Secrétaire général de l’IRW-CGSP