C’est l’histoire d’un refus, refus de l’État belge de venir en aide à une famille avec 3 enfants en bas âge tentant désespérément de fuir la guerre.

Refus qui en aurait scandalisé beaucoup si la famille en question n’était pas originaire d’Alep en Syrie. Mais, dans le climat de peur ambiant, nous sommes tous confrontés à des proches affirmant qu’il est nécessaire de fermer les frontières. Ce climat a pour conséquences que l’on ne trouve pas révoltant le sort fait à cette famille et, à travers elle, à tous les migrants du monde. Il faut prendre garde car la peur risque de faire de nous des monstres égoïstes insensibles aux malheurs et aux souffrances des autres. Des monstres incapables de comprendre que la violence infligée à un être humain, d’où qu’il soit, est une violence faite contre l’Humanité dans son entièreté.

Car ni la peur du terrorisme, ni la peur des autres, pas plus que la situation économique difficile de notre pays ne justifie de rester sourds aux cris de détresse qui nous proviennent de Syrie et d’ailleurs. Il faut être lâche, ou crapuleux, pour oser refuser le droit élémentaire à la protection internationale et se cacher derrière des arguments juridiques.

La Cour de Justice européenne vient pourtant de donner raison à l’État belge dans son refus d’octroyer des visas humanitaires à cette famille.

Cet arrêt de la Cour de Justice nous donne l’occasion de rappeler que le Droit n’est pas neutre, que son interprétation est souvent le résultat d’un rapport de force.

Une règle de droit peut être interprétée de différentes manières.

Ainsi, dans ses Conclusions (travail préparatoire à l’arrêt) l’avocat général de la Cour de Justice de l’UE, Paolo Mengozzi, avait une lecture des règles juridiques toute différente de celle de ses confrères. Se basant sur les mêmes sources de droit qu’eux, il appelait les États membres à ne pas fuir leurs responsabilités et à faire honneur aux règles de droit international permettant à cette famille de recevoir la protection demandée.

En reconnaissant que les États membres peuvent refuser l’octroi d’un visa humanitaire, la Cour de Justice et la Belgique refusent à reconnaitre les voies légales d’accès à la protection internationale. Ce faisant, ils poussent ceux qui veulent échapper à la guerre à mettre leur vie en danger. La Cour, le Gouvernement belge sont donc coresponsables de la mort de toutes ces personnes dans les eaux sombres et froides de la Méditerranée. Ils sont complices de ces passeurs sans scrupule qui s’enrichissent sur la misère et la détresse des migrants. En d’autres termes, en faisant une telle lecture du droit international, ils choisissent leur camp, celui du racisme, de la haine et de la lâcheté.

Pour notre part, nous condamnons sans réserve ce choix politique et nous continuons de dire et de crier que personne n’est illégal.

Nous voulons être de ceux qui ne feront jamais écho à la peur, à la haine et au racisme et qui par leur comportement au quotidien, parfois par de tout petits gestes, feront la preuve que seules la Solidarité, la Fraternité et l’Égalité sont porteuses de progrès.

Nous ne jetterons pas les bases de demain sur des charniers ou sur des ruines mais sur des valeurs universelles qui enchantent nos vies et nous donnent des raisons de lutter !

Patrick LEBRUN

Secrétaire général de l’IRW

Laurent PIRNAY

Secrétaire général adjoint de l’IRW

Edito de la Tribune d’avril 2017