Le ministre De Croo, en charge notamment de l’Agenda numérique, des Télécoms et de la Poste a donné plus de précisions sur la réforme de la loi du 21 mars 1991 portant sur certaines entreprises publiques. Les éléments annoncés attaquent une nouvelle fois le service public. Sous appellation jargonneuse de “Level playing field” le gouvernement annonce de nouvelles dispositions internes censées augmenter la compétitivité des entreprises publiques visées à savoir Proximus [Anciennement Belgacom] et Bpost. A nouveau, cette volonté de rendre le service public concurrentiel est revendiquée, à nouveaux les objectifs du service public sont mis de côté voir ignorés. La rentabilité ou la concurrence sont autant d’objectifs économiques qui entrent souvent en confrontation avec les valeurs de continuité, d’égalité ou d’accessibilité. Nous l’avons répété à maintes reprises, maintenir des bureaux de poste dans les zones rurales, peupeuplées, n’est pas rentable mais, est plus que nécessaire pour un service postal publique qui souhaite offrir à tous les citoyens la possibilité d’envoyer une lettre ou de recevoir des courriers officiels recommandés. De même, dans les zones reculés, câbler le réseau de télécommunication avec les dernières technologies comme la fibre optique représente certes un coût financier important mais, s’inscrit dans une volonté d’égalité d’accès aux TIC à laquelle doit répondre une entreprise publique comme Proximus.
- Suppression du verrou légal qui veut que l’état soit actionnaire majoritaire des entreprises publiques. La nouvelle loi permet donc à l’état de revendre ses actions et de passer en dessous des 50% d’action si le juge nécessaire notamment pour réduire la dette publique. S’il n’est actuellement pas prévu de vendre les parts de l’état, le ministre annonce que cette revente pourra se faire sur simple décision du conseil des ministres par arrêté royal. Il est clair, que la revente est d’ores et déjà envisagée comme mécanisme d’équilibre budgétaire alors qu’en restant actionnaire majoritaire, l’état récupère une somme importante chaque année via les dividendes. On s’oriente une fois de plus vers une gestion politique dictée par des budgets à l’équilibre et pas par une stratégie à long terme ou la volonté de rendre un service de qualité au citoyen.
- L‘attaque frontale au statut des fonctionnaires puisque le ministre annonce que le cadre différent de recrutement de l’occupation statutaire sera abandonné au profit de l’occupation contractuelle.
- L‘autorisation du recours et sous-traitants et aux indépendants qui a souvent pour conséquences de créer des cadres de travail déplorables pour les travailleurs des sous-traitants. Concernant les indépendants, il est clair que la plupart sont en réalité de faux indépendants qui travaillent exactement comme des employés mais qui échappent complètement à la législation sociale puisqu’ils ne sont pas liés à un contrat de travail.
- L‘application du mode d’administration des entreprises cotées en bourse, le gouvernement n’aura plus de droit de regard sur les nominations des administrateurs ou du CEO. L’état comme n’importe quel actionnaire devra faire entendre sa voix par les canaux prévus à cet effet et en fonction de son poids actionnarial. Autant dire que les considérations en matière de services publics ou les limites en matières de salaires des administrateurs seront rapidement mises aux oubliettes.
Le compte à rebours a donc commencé, Proximus et Bpost, si cette loi est votée ne mettront pas longtemps avant d’être privatisée et rachetée par d’autres grands groupes des télécommunications ou des transports. La garantie des emplois et du service écharpera alors complètement au gouvernement. Certes la vente des actions permettra à l’échelle d’un exercice budgétaire de combler tel ou tel déficit [8,6 milliards d’euros] mais, dans le long terme, les emplois perdus, les services défectueux ou abandonnés viendront gonfler les coûts d’autres postes du budget. Une vision politique aberrante menée par un gouvernement opportuniste et libéral. Après la poste et les télécommunications, à qui le tour ?
Nous réclamons le maintient dans le giron public de Bpost et de Proximus. Parce que la distribution du courrier postal et les télécommunications doivent rester un service public accessible à tous, à un prix démocratique et en toute confidentialité. L’état a déjà fortement attaqué ces deux services et les conséquences sont déjà bien visibles. Plus de cabines téléphoniques publics depuis 2 mois, des bureaux de postes supprimés par dizaine et remplacé par des bouchers, des libraires ou des boulangers… Au mépris de la qualité du service rendu… au mépris des principes même du service public.
Stop donc à la révision de la loi de 1991 ! Stop à la privatisation des services publics, la première richesse des citoyens.
Lire le communiqué de presse du ministre DE CROO en PDF
[1] Camille van Vyve, Privatiser Proximus et bpost, une manoeuvre purement idéologique ? in Trends Tendances.be, En ligne [URL] http://trends.levif.be/economie/politique-economique/privatiser-proximus-et-bpost-une-manoeuvre-purement-ideologique/article-opinion-393585.html