Edito de la Tribune de septembre 2016
Le 23 juin dernier, pour la première fois dans l’histoire de la construction européenne, un pays appelait ses électeurs à se prononcer sur son maintien, ou non, au sein de l’Union.
Nous savons quel choix a été celui du Royaume-Uni, il a, depuis lors, été abondement commenté. Mais il est nécessaire de prendre un peu de recul et de tirer, sereinement, les enseignements de cet évènement. Car, comme souvent lorsqu’il s’agit de questions européennes, les débats ont été enflammés, parfois indignes, et les sentiments ont souvent pris le pas sur les arguments de fond.
Le premier constat que l’on peut faire est que l’organisation même de ce référendum traduit l’absence de confiance des citoyens dans l’Union européenne. Le BREXIT n’est pas une victoire mais, d’abord et avant tout, un constat d’échec. Voilà quel doit être le point de départ de toute réflexion européenne, oser poser le constat lucide que cette Europe déçoit la grande majorité des citoyens et pire encore, leurs inspire, à juste titre, de la méfiance !
Cette Europe de l’austérité, cette Europe forteresse qui fait du marchandage avec des réfugiés fuyant la guerre, cette Europe des marchés financiers et des lobbies patronaux n’est pas la nôtre ! Mais alors que faire ?
La première réponse qui vient directement à l’esprit est de la quitter, d’abandonner le navire. Toutefois, faire le choix du repli sur soi et de l’isolement peut-il être le nôtre ? Le changement de société auquel nous aspirons, les valeurs de solidarité, de fraternité et d’internationalisme qui nous tiennent à cœur peuvent-elle s’accommoder de pareille désertion ? A l’heure où nos démocraties sont gangrénées par le nationalisme, le racisme, la haine et le rejet des autres, la réponse ne peut-être que NON ! Il nous faut, au contraire, faire la preuve que l’on peut (que l’on doit) travailler ensemble à la construction d’un projet commun, d’un projet qui nous dépasse, d’un projet qui nous rassemble par-delà nos différences !
Alors, faire le constat que cette Europe ne nous convient pas doit nous conduire à la seule option possible ! Il faut en changer. La tâche semble titanesque, démoralisante et pourtant elle est, plus que jamais, nécessaire. Pour ce faire, il nous faut oser remettre en cause les fondements même de l’Union Européenne, oser contester ses dogmes (stabilité des prix, réduction de la dette publique…) qui nous conduisent à la catastrophe, il faut oser sortir du cadre qui nous est imposé.
On ne changera l’Europe ni en la quittant, ni en respectant les règles des Traités. On changera le cours de la construction européenne en osant désobéir ! Pour ce faire, il nous faut travailler à la construction d’un front le plus large possible afin de faire progresser cette idée. Il nous faut réfléchir aux alternatives que nous voulons proposer. Il nous faut oser le bras de fer et le rapport de force !
Il faut avoir des rêves suffisamment grands pour ne jamais les perdre de vue. La construction européenne a été une revendication des organisations de gauche. Elle nous a, depuis lors, été confisquée. Il nous appartient de ne pas jeter la proie pour l’ombre, de ne pas céder au discours du repli et de l’égoïsme mais au contraire de réinvestir le projet européen.
Ce n’est donc pas avec le rêve européen qu’il faut en finir, mais seulement avec cette construction qui fait de lui un outil aux mains des marchés financiers ! Cela passera notamment par une opposition ferme à toutes les politiques d’austérité imposées dans les Etats membres.
Il n’est pas trop tard, l’heure a sonné, voilà le message qu’il faut délivrer après le Brexit !
Patrick Lebrun
Secrétaire général IRW-CGSP
Laurent Pirnay
Secrétaire général-adjoint IRW-CGSP